22 mai 2007

La stupidité volontaire

C'est bien beau dire que la religion est stupide, mais encore faut-il le prouver: c'est une affirmation qui est essentiellement subjective. J'ai donc étudié la question et j'ai échafaudé une théorie – arr hum – scientifique que j'ai développé et que je vous présente en toute – khoff ackk – modestie. J'appelle cette théorie Principe de Silex sur la stupidité volontaire, un principe en quatre étapes, et ça procède comme suit:

Phase un: L'individu se trouve confronté à une réalité gênante, désagréable, voire même traumatisante. Peut-être soufffre-t-il d'une maladie incurable; peut-être a-t-il récemment perdu un être cher. Ou peut-être qu'il a un problème de dépendance, ou un complexe de culpabilité lié à une quelconque activité à la moralité douteuse; peut-être est-il écrasé par le poids des responsabilités. Ou peut-être simplement fait-il face à la soudaine réalisation de l'indicible insignifiance de son existence, et de l'infinie pauvreté de la contribution réelle qu'il apporte au grand Plan Cosmique. Les scénarios varient pour chaque personne, mais à la base le principe reste le même: l'individu est face à une vérité qu'il est incapable de supporter, et cherchera donc à la fuir d'une manière ou d'une autre. Pour ce faire, il niera la réalité et y substituera la sienne, soit en la réinventant, ou soit le plus souvent en en adoptant une déjà faite qui lui aura été présentée par un croyant. J'appelle cette phase le déni

Phase deux: L'individu est maintenant converti à un nouvel ensemble de valeurs, principes et thèses qui ensemble forment une idéologie. Cette idéologie constitue la nouvelle réalité du sujet et lui apporte un sens à sa vie, une nouvelle identité et soignera son ego souffreteux en gonflant son estime personnelle. Tous ces bénéfices provoquera un effet de dépendance et le rendront réticent à remettre cette idéologie en question; il cherchera au contraire à la justifier coûte que coûte en appliquant le principe de Welles (dont j'ai déjà parlé l'année dernière), à savoir il va choisir de comprendre les informations qu'il reçoit si elles tendent à supporter son idéologie, et va adapter, déformer, voire même ignorer celles qui tendent à la contredire. C'est l'étape de la croyance.

Phase trois: Plus la croyance est irréaliste, voire farfelue, plus le sujet devra redoubler d'ardeur afin de la justifier. Éventuellement, la ferveur avec laquelle il oeuvre à réinventer la réalité va atteindre un point critique où elle va engendrer une réaction en chaîne en créant sa propre raison d'être. L'individu a maintenant la conviction que le fait même d'avoir une croyance constitue une preuve ipso facto de la dite croyance: autrement dit c'est vrai parce qu'il y croit. C'est l'étape de la foi.

Phase quatre: L'individu est dorénavant coincé dans un cercle vicieux: "j'y crois parce c'est vrai, c'est vrai puisque j'y crois", un véritable maelstrom de stupidité qui l'entraîne toujours plus profondément dans un abysse de croyance où le contact avec la réalité se fera de plus en plus ténu. Le sujet a maintenant atteint la conviction que puisqu'il croit en son idéologie, prouvant ainsi la véracité de celle-ci, tous ceux qui ne partagent pas cette croyance sont dans l'erreur et doivent par conséquent se faire montrer le "droit chemin", soit par la persuasion, le harcèlement, l'endoctrination, voire la violence verbale et même physique; cette étape est celle du fanatisme, le dernier stade de la stupidité volontaire.

Tous les individus ne franchissent pas toutes les étapes; nous sommes tous sujets à l'étape un, et la plupart d'entre nous ont déjà mis le pied dans la phase deux à l'occasion. Certains ont déjà atteint la phase trois mais en sont revenus, quelquefois avec d'énormes difficultés. Mais pratiquement personne ne revient de l'étape quatre: le fanatisme est un trou noir, une singularité de stupidité si incroyablement dense qu'aucune raison, aucune logique ne peut s'en échapper.

Certains autres sautent des étapes, et peuvent passer directement du déni à la foi; c'est couramment le cas chez les "born again" par exemple. D'autres n'ont jamais eu à faire le choix: endoctrinés dès la tendre enfance, ils ont atteint la phase trois, voire même la quatre, avant que leur esprit aie eu la chance de faire un chois éclairé. On parle encore de stupidité volontaire, mais à cette nuance près qu'on parle de la volonté de quelqu'un d'autre. Au bout du compte, le plus grand drame de la croyance est qu'elle est une maladie contagieuse.
(parodie) Annonces iglou iglou iglou

Quoi, vous en voulez encore?